Je commencerai par une bonne et une mauvaise nouvelle :
– La bonne : la valeur travail se porte bien. Elle reprend des couleurs y compris dans la jeune génération dite génération Y et Z.
– La mauvaise : le travail se porte mal. Je parle de l’emploi à la peine aujourd’hui mais exposé demain, selon certains, à une véritable saignée.
Je reprends ce double constat :
– La valeur travail se porte bien.
Rien de plus révélateur du changement en cours que le souci affiché de l’aborder par d’autres voies que son seul versant négatif et destructeur. Témoin, cette autocritique de François Chérèque, alors secrétaire général de la CFDT, au terme d’une belle enquête dans le monde du travail : « N’ai-je pas, s’interroge-t-il, une vision de leur situation plus négative que ces salariées ? […] C’est une leçon de vie pour un syndicaliste comme moi, parfois enclin à noircir le tableau… [1] ». Et un autre responsable cédétiste de souligner que « dans notre projet, le travail n’est pas seulement envisagé sous son aspect de contrainte, de source de mal-être ou de souffrance. Nous voulons aussi le traiter dans sa dimension positive, au travers des satisfactions qu’il peut apporter [2] ».
– L’emploi serait exposé à une fonte accélérée dans les temps à venir ?
D’où le débat engagé depuis plus d’un an autour de l’impact du numérique sur le volume du travail humain. Ces derniers jours encore, sur le site Télos, Gilbert Cette soulevait la question : « La révolution numérique est-elle une menace pour l’emploi ? ».
La réponse ne fait pas de doute pour les économistes d’Oxford USA selon qui 40 à 50 % des emplois sont directement menacés par les logiciels et algorithmes.. Et si l’on suit Bruno Teboul, spécialiste du numérique, « la vague d’automatisation qui s’annonce sera un véritable tsunami » y compris du point du contenu du travail.
C’est un point de vue beaucoup plus nuancé qui est défendu par le Conseil d’orientation pour l’emploi pour qui le chiffre serait bien inférieur, de l’ordre de 10%.
Le théorie du déversement (Sauvy, Schumpeter ) va-t-elle trouver lieu de s’appliquer : du tertiaire vers le quaternaire ? Pas certain…. En même temps, les choses vont si vite qu’on ne sait pas ce que l’avenir nous réserve. Une illustration : aucun des 10 métiers les plus recherchés en 2010 n’existait en 2003.
Nous n’en sommes pas là et pour l’heure la question est de comprendre les enjeux de la mutation en cours et son impact sur la configuration et le style d’une activité professionnelle de plus en plus digitale.
Et pour bien saisir la singularité du temps présent, il faut insister sur les facteurs d’innovation et de rupture mais on peut aussi se demander si au fond certains des grands changements en cours n’étaient pas déjà à l’œuvre dans le monde du travail.
C’est à quoi je vais m’employer dans ce propos qui mettra en valeur trois grandes mutations engagées depuis les années 1980-1990 : la personnalisation du travail, son autonomisation et sa réticulation, c’est à dire sa mise en réseau.
I – PERSONNALISATION
Les prémices de la grande transformation actuelle se repèrent dès les années 1970-1990. Et pour ce qui concerne la France, je la daterai de la publication du livre d’Alain Touraine, La société post-industrielle en 1969. L’auteur y montre que l’on sort de la société industrielle du fer, de la vapeur, de l’électricité et du pétrole en évoluant vers la société du savoir dans laquelle le capital n’est plus d’abord matériel mais intellectuel. Le capital c’est la connaissance et la capacité d’innovation. On commence à basculer vers la société des services qui représentent aujourd’hui 70% de l’activité.
Et cela est au principe d’une véritable mutation anthropologique, liée à la prise en compte du « facteur humain »dans l’acte de travail lui-même. Il faut se souvenir que jusque dans les années 70, la dimension intellectuelle, morale du travail comme activité se trouve encore presque totalement passée sous silence. Dans le droit de l’hygiène, de la sécurité et même celui des conditions de travail, le salarié est perçu comme un corps protégé par un droit fonctionnant comme un «garde-corps » qui non seulement n’accorde aucune part à son initiative mais au contraire s’en méfie et cherche à la restreindre le plus possible (c’est la philosophie de la grande loi de décembre 1976 et des grands décrets de 1983 dits « décrets-machines » )
La nouvelle problématique éclate au grand jour dans la directive-cadre de juin 1989 portant reconnaissance du droit à la santé au travail et faisant obligation au salarié de « prendre soin » de sa santé et de celles des personnes concernées par ses actions ( L 4122-1). C’est une rupture beaucoup plus importante qu’il n’y paraît, rupture qui marque la prise en compte, au cœur même du travail, de la personne du salarié, par ailleurs nouvellement reconnu comme acteur juridique à part entière ( cf. la loi du 4 août 1982 ) et à un double titre :
m d’abord, en tant que personne reconnue dans son intégrité et son intégralité à la fois comme corps, longtemps seul objet considéré par le droit, mais aussi comme esprit dans sa triple dimension intellectuelle, psychologique et morale. On finissait enfin par admettre que la souffrance morale pouvait être aussi ravageuse que la souffrance physique seule prise en compte jusqu’alors. Et cela marquait l’aboutissement du mouvement de ré-humanisation du travail initié par Georges Friedmann pour le meilleur comme pour tout le reste.
m en second lieu, il est reconnu en tant qu’associé à l’œuvre de prévention qui, après avoir été pensée sans les travailleurs et souvent « contre » eux, à leur corps défendant pourrait-on dire, les intégrait désormais comme une variable pertinente.
La prise en compte de la « charge mentale du travail » [3] au cours de la décennie 1980 va condenser ce redéploiement des perspectives.
Il faudra encore du temps pour que cette nouvelle approche soit réellement prise au sérieux, pour qu’elle oriente les pratiques et les choix. Si bien que lorsque les services de santé au travail commencent dans les années 1980-1990, à parler de « nouvelles pathologies du travail », de « stress moral, psychologique et physique (TMS ) », et bientôt de risques « psycho-sociaux », on leur oppose une vive résistance dans les milieux patronaux. Ce langage demeure inaudible. Il suscite incrédulité et dénégation. Il s’agirait plutôt, estime-t-on de ce côté-là, d’une « névrose de masse » plus imputable au nouveau style de vie, aux difficultés de l’existence privée qu’au travail lui-même. Si la remarque n’est pas totalement infondée, reconnaissons qu’elle donne hâtivement dans le raccourci. Et lorsque l’enquête SUMER [4], menée en 1987 par la DARES avec le concours de 600 médecins du travail, est présentée au Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, il est révélateur qu’un représentant du monde patronal fasse part de son scepticisme en allant jusqu’à se demander si les médecins n’ont pas forcé les résultats relatifs à la mauvaise santé mentale dans les entreprises
Ce qui prouve que cette mutation n’allait pas de soi !
Voyons ses effets :
– Demande d’accomplissement : valorisation du travail mais aussi fossé entre cette idée et la réalité, générateur de souffrance ( sentiment d’un travail mal fait, pas à la hauteur des exigences ).
– Indissociation et parfois confusion entre espaces professionnel et personnel. Patrick Flichy parle de « travail ouvert [5] » selon la logique englobante du « faire ».
– Décomposition des collectifs traditionnels. Ce qui pose la question d’une nouvelle alliance entre l’individu et le collectif. Comment échapper aux excès de l’individualisme et du collectivisme en créant une véritable synergie entre l’individu et le social ?
Ce n’est pas du tout une question nouvelle : socialisme français ( cf. Jaurès, Proudhon, Durkheim, Gurvitch…). Mais il est certain qu’elle fait puissamment retour depuis quelques années et en des termes renouvelés.
D’abord dans les faits. Je reviens sur la découverte que je fais, dans les années 1985, à l’occasion d’une visite dans une usine de Quimperlé. On me fait part du travail réalisé par un groupe de salariés en vue de limiter les « pertes de produit lors du changement de formule ». Après plusieurs semaines d’intense travail, ils remettent à la direction un mémoire dont les préconisations devraient permettre une économie de 10000 F de l’époque, soit 1500 euros environ, par machine. Ce qui dans l’affaire attire mon attention c’est la photo du groupe qui tient lieu de frontispice au document. Et je me dis : « Mais voilà une figure nouvelle du social ! » caractérisé par trois traits : sa personnalisation (collectif fortement individualisé), sa fonctionnalité (résolution d’un problème ) et son caractère éphémère ( le temps de la mission ).
Je vais en avoir confirmation avec la publication dans Le Monde de huit pleines pages de mobilisation par la direction avec cette particularité que le collectif des salariés y apparaît sur un mode très individualisé…
Mais aussi retour évident dans la littérature sociologique de ces dernières années.
Il s’annonçait depuis quelque temps déjà avec, entre autres, un ouvrage comme celui d’Alain Touraine en 1984 significativement intitulé Le retour de l’acteur, donc de l’individu social dans le jeu collectif, avec une interrogation forte sur le risque de « fin du social [6] » dont il dresse le constat dans son livre Après la crise [7] avant Fin de la société qui vient de paraître.
C’est une vision plus positive de l’individualisme qui prévaut dans un certain nombre d’ouvrages récents centrés sur la recherche d’un nouvel équilibre entre l’individu et le collectif. Le fait est particulièrement net chez De Singly qui insiste sur les complémentarités (- cf. Les uns avec les autres. Quand l’individualisme crée du lien [8] et L’individualisme est un humanisme) ; même pari chez Jean-Claude Kaufmann dans L’invention de soi. Une théorie de l’identité dont l’interrogation est la suivante : « Comment l’individu peut-il dire « je » en pensant aussi « nous » [9], ou encore Danilo Martucelli dans La société singulariste [10] dont le titre dit bien le propos : « Comment faire société à partir des singularités ? ». La sociologie, dit-il, est née de la masse, du collectif. Or, désormais, « elle ne peut plus continuer à se pratiquer comme avant », elle doit « personnaliser davantage les analyses », « produire des formes d’études plus singularisées ». Bref, elle doit devenir « une sociologie pour les individus » sur fond d’« une nouvelle sensibilité sociologique ».
Au fond, tout passe par l’accès au statut d’acteur dans la vie professionnelle. C’est l’inspiration même des lois Auroux de 1982 [11]…. Une voie difficile parce que coûteuse en efforts :
– pour l’entreprise ou l’association qui doit passer d’une logique de l’organisation rationnelle à une stratégie de la suscitation d’initiatives.
– pour les salariés dont on peut attendre qu’ils manifestent, par un investissement personnel, leurs capacités et leur contribution originale au fonctionnement du collectif. Ce qui veut dire, pour reprendre les termes de Stéphane Hessel, passage d’une indignation parfois facile justifiant le retrait à l’engagement ( Engagez-vous ! ).
– Souffrance au travail : charge mentale, harcèlement… Plus de personnalisation = plus d’exposition du visage à la brûlure relationnelle. On est passé du rôle anonymisant fonctionnant comme un masque protecteur au visage valorisé mais vulnérable.
Dans le même temps, et de manière relativement indépendante, se produisait une nette transformation du contenu et du style du travail.
II – AUTONOMISATION
Elle accompagne naturellement la personnalisation et se déploie sur trois plans : technique ( plus d’initiative et de responsabilité ), spatial ( les frontières travail/non-travail s’érodent tandis que travail et travailleurs redeviennent nomades ) et horaire avec l’horaire variable particulièrement pour les salariés travaillant à distance du siège.
Grande mutation s’est produite dans les années 1980 avec le développement, dans un tertiaire en pleine expansion, d’activités et métiers ne se coulant plus dans le moule traditionnel des unités de temps, de lieu, à vie. Avec un phénomène de nette amplification dans les générations Y et Z ( si 79% des jeunes salariés sont satisfaits de leur travail, le taux monte à 88% chez les jeunes autoentrepreneurs du fait d’une autonomie très prisée).
C’est un progrès. Il faut se souvenir que dans les années 1950 – 1970 les sociologues du travail, tels Friedmann ou Naville, n’en faisaient-ils pas la condition de ré-humanisation du travail ? A l’époque on n’avait d’yeux que pour les expériences d’autonomie menées dans les pays nordiques et particulièrement chez Volvo dans son usine-pilote de Kalmar puis d’Uddevalla.
Mais c’est un progrès qui peut se révéler coûteux pour les salariés qui découvre le prix de l’autonomie en termes de responsabilité. Au geste machinal étroitement surveillé, aux procédures imposées succède une forme de relative indépendance mais sous contrainte d’objectifs et donc de résultat. Objectifs souvent hors de portée : « On nous impose des objectifs inatteignables. Je suis atteint par la culpabilité du chiffre » ( agent du Pôle Emploi ).
85% des salariés seraient aujourd’hui dans ce cas de figure d’une auto-discipline génératrice de charge mentale et de stress. D’où la peur de ne pas être à la hauteur : chez Peugeot : « colère contre la ligne, contre la maîtrise, contre eux-mêmes […]. Aux changements de production, nombre de monteurs prennent peur : peur de ne pas tenir le poste, de « couler », de ne pas être à la hauteur et donc d’être déconsidéré par autrui […]. Il dit souffrir d’angoisse et de stress [12] ».
Et ceci peut se trouver aggravé par des injonctions contradictoires qui finissent par brouiller l’image du « travail de qualité » en créant une incertitude très perturbatrice quant à ce que l’on attend du salarié :
– on demande aux caissières des grandes surfaces accueil, sourire, amabilité en imposant le rythme d’un client toutes les trois minutes, d’un objet toutes les trois secondes…
– la directrice de la PJJ de Paris qui a tenté, il y a quelques années, de mettre fin à ses jours par défenestration, a expliqué son acte par la contradiction entre les objectifs assignés et les moyens alloués.
Et de surcroît, cette autonomie peut se révéler un trompe l’œil lorsqu’elle ne s’accompagne pas des moyens correspondants ( pas d’empowerment conséquent ).
Conséquences :
– Quant aux attentes : de reconnaissance de singularité…. Avec questionnement producteur d’angoisse sur la compétence, la capacité, la capabilité….
– Quant au mode de travail, de plus en plus, par objectifs avec de nouvelles techniques de contrôle.
– Quant au statut : salarié ou indépendant ? On peut finir par en douter dans bien des cas. Ci-joint un article que j’ai publié dans Ouest-France le 27 septembre 2017.
TRAVAIL : BROUILLAGE DE FRONTIERES
Curieusement, à l’heure du « retour des frontières » géopolitiques s’observe une nette tendance à leur érosion dans maints secteurs de la vie sociale et politique. Ainsi, entre autres, du clivage droite/gauche, du positionnement parents /enfants ou, plus radicalement, de la distinction homme/femme perturbée par l’émergence du sexe « neutre »… Une évolution qui affecte aussi le monde du travail où des distinctions que l’on croyait stables s’assouplissent, deviennent flottantes dans notre « société liquide » ( Braumann ), pour le meilleur et pour… le reste. L’actualité vient d’en fournir deux illustrations avec l’annonce de la suppression du Régime social des indépendants (RSI) et la décision de la Cour européenne des droits de l’homme sur la vie privée du salarié dans l’entreprise.
La fin annoncée du RSI va marquer l’entrée tardive de la protection sociale des indépendants dans le giron du régime général de SS et de l’Unedic pour l’assurance chômage universelle. On l’attendait depuis…1945 et c’est juste. L’objectif est de doper le travail indépendant qui a déjà le vent en poupe depuis l’instauration de l’auto-entreprenariat et l’amplification du cumul des statuts salarié et indépendant. Il est aussi de prendre acte de la parenté de style entre les deux formes d’emploi : de plus en plus d’autonomie dans le travail salarié ; de plus en plus de dépendance dans celui d’indépendant comme l’illustre le cas des chauffeurs Uber ou des livreurs Deliveroo, « salariés-artisans » de statut indécis.
Un état de confusion qui pourrait se révéler préjudiciable aux salariés. Car si les indépendants se rapprochent des salariés, l’inverse est aussi vrai nombre de salariés évoluant vers le statut d’indépendants et, souvent, sans grand choix. C’est en cours depuis les années… 1970 où l’on a vu des entreprises contraindre leurs salariés à prendre leur carte d’artisans tout en leur garantissant la poursuite des relations. Des facteurs nouveaux ont toute chance d’amplifier le phénomène : non seulement un désir d’autonomie croissant mais aussi des formes de sous-traitance plus ou moins vraie qu’il s’agisse des free-lances, des slashers cumulant les emplois sans oublier le Turc mécanique d’Amazon qui organise un travail totalement fragmenté, en ligne et à la pièce, de traduction, d’analyse d’images, de sondage ou tout simplement de facturage. Des petits travaux à la tâche rémunérés très….petitement, souvent à raison de 10 centimes d’euro !
C’est une confusion similaire qui s’instaure dans l’entreprise entre la vie privée du salarié et sa vie professionnelle. En admettant que le salarié puisse passer des mails personnels sur le lieu de travail, la Cour de Strasbourg contribue sans le vouloir à l’effacement de la frontière entre ces deux séquences de la vie ordinaire avec, en retour, le risque de voir la vie personnelle polluée par la vie professionnelle par le biais des ordinateurs et téléphones portables. C’est tout le débat autour du « droit à la déconnexion ». Mais on n’en est qu’à l’aube de cette imbrication du personnel et du professionnel, si l’on en croit Patrick Flichy qui dans Les nouvelles frontières du travail à l’ère numérique ( Seuil ) vante les vertus du « travail ouvert » qui inclurait la part privée de l’existence. Il devient impossible de « faire la coupure entre la maison et le bureau, entre l’amateur et le professionnel ». Soit mais on ne sait que peu de choses des incidences d’une telle évolution !
III – RETICULATION
Un nouveau style de relations de travail remarquable au paradoxe qui le caractérise. Jamais le travail salarié n’a été aussi relationnel qu’à présent. Il s’inscrit dans un réseau serré d’échanges, de communications, de confrontations des informations et des savoirs. Il est, en ce sens, vecteur de collectif dans des organisations plates valorisant la dimension horizontale avec questionnement / positionnement de hiérarchie qui change de nature. « Désormais nous sommes gouvernés par des hiérarchies abstraites, incarnées dans des rituels, des règles et processus informatiques ».
Mais le plus intéressant, c’est la naissance d’une nouvelle forme de social qui allie coopération ( valeur redécouverte ) et le personnel. Ce qui fait qu’ « une action collective émerge de la convergence d’actions individuelles indépendantes, sans contrôle hiérarchique [13] » ( ou allégé ). Image intéressante de l’orchestre de jazz… avec des musiciens qui jouent à la fois dans le groupe et contre lui…. ( archétype de cette nouvelle configuration : le hacker qui cherche à prendre une organisation ou des procédures en défaut, dans l’intérêt bien compris de l’entreprise ).
Et de l’importance de bien situer chacun dans le processus collectif et l’utilité de sa contribution à l’ensemble ( histoire des tailleurs de pierre : 1 ) Je casse des cailloux ; 2 ) Je nourris ma famille ; 3 ) « Je bâtis une cathédrale »….
Et tout cela, il faut aussi le dire, selon un tempo de plus en plus rapide ( accélération : en dire un mot ) et sur un mode plus parcellisé ( micro-tâches : Turc mécanique d’Amazon… ).
*
Madame Pénicaud s’est déclarée, il y a peu « très preneuse d’une négociation interprofessionnelle sur les nouvelles formes de travail et la formation [14] ». Il y a urgence en effet !
Jacques LE GOFF
Auteur de Le retour en grâce du travail.
Du déni à la redécouverte d’une valeur
( Lessius, 2015 )
[1] Patricia, Romain, Naila et les autres, 2011,
[2] P. Maussion, CFDT Magazine, juin 2011, p. 7. On pourrait aussi citer l’écrivain italien Pennacchi déclarant à propos de son roman Mammouth : « L’usine n’est pas seulement le locus infernalis de Virgile Elle est aussi et surtout un lieu d’humanité auquel il faut restituer une dignité », L. Levi, 2013.
[3] La question étant déjà esquissée antérieurement. Cf, entre autres, l’article pionnier de P. Sivadon – Problèmes d’hygiène mentale posés par le travail industriel ( Droit social, septembre-octobre 1957 ). « Certes, y écrivait-il, il n’entre pas dans la mission immédiate de l’industriel d’assurer le bonheur de ses ouvriers. Mais il entre dans sa technique de considérer qu’une organisation industrielle qui impose une souffrance nerveuse est aussi défectueuse que celle qui impose un dommage physique » ( p 482 ).
[4] SUrveillance MEdicale des Risques.
[5] Les nouvelles frontières du travail à l’heure numérique, Seuil, 2017.
[6] P. 130.
[7] Seuil, 2010.
[8] Armand Colin, 2003.
[9] Armand Colin, 2004, p. 122.
[10] Armand Colin, 2010.
[11] Cf. mon ouvrage Du silence à la parole. Droit du travail, société, Etat des années 1830 à nos jours, PUR, 2006, p. 467ss.
[12] J.-P. Durand, N. Hatzfeld, La chaîne et le réseau, p. 61.
[13] Flichy, 159.
[14] Le Monde, 16 septembre 2017